Suppression de l’Arabe à Masséna

Un prétexte technocratique (allègement des effectifs des lycées du centre de Nice) a été mis en avant en décembre 1998 pour supprimer l'enseignement de l'Arabe au lycée Masséna : la création d'un "pôle" de langues rares au lycée du Parc Impérial.

Les protestations sont multiples : pétitions massives des élèves et des enseignants de Masséna; soutien de personnalités (dont JMG Le Clézio). La presse en fait état. Les élus interviennent auprès du recteur: MM. P. Allemand, premier vice-président du Conseil régional P.A.C.A., et M. Papi, conseiller général des Alpes-Maritimes. Même les Renseignements Généraux s'inquiètent d'éventuelles conséquences dans les quartiers dits "sensibles".

Rien n'y fait. Les inscriptions en seconde à Masséna sont refusées dès le mois de juin. La décision de fermeture est prise le 20 juillet, sans aucune notification aux principaux intéressés (enseignants, syndicats, élèves, parents et élus). Néanmoins, à la rentrée, au total 21 élèves, régulièrement inscrits à Masséna, déclarent souhaiter un enseignement d'Arabe, ce qui remplit largement les conditions administratives (minimum : 12). Aux demandes de réouverture, pas de réponse. En novembre, le recteur justifie la fermeture par ... l'absence d'inscriptions.

Pourtant, cette mesure ne résiste pas à l'épreuve des faits: (1) la modification de la carte scolaire est inopérante (pas de transferts d'effectifs à la rentrée 1999 vers le site nouveau, où l'Arabe était déjà enseigné), (2) une conséquence grave: une déperdition de plus de 50% des effectifs accueillis en Arabe en seconde sur l'ensemble de Nice, et (3) un seul résultat administratif tangible : la diminution du service d'Arabe à Masséna, avant la disparition pure et simple du poste.

Bientôt, par voie de conséquence, les élèves arabophones ne pourront plus être accueillis en classes préparatoires dans le Département. Les polytechniciens, centraliens, HEC, et autres (jusqu'à 19 par an), qui ont suivi cet enseignement depuis 1982 à Masséna apprécieront.

La volonté affichée par le Ministère de développer l'enseignement de l'Arabe (et qui s'est notamment traduite par l'augmentation des postes d'enseignants mis au concours) est ainsi contrée. La diminution de moitié, programmée, des moyens à Nice (un poste sur deux) accroît la difficulté d'intégrer des élèves provenant des quartiers dits "sensibles": ils sont maintenant poussés à l'abandon de l'Arabe, et le risque réel d'un enseignement non laïc et non républicain en est aggravé dans les cités.

Rien ne justifie, ni par les effectifs, ni par les enjeux géopolitiques que l'Arabe soit traité comme "option de confort". Le rôle d'intégration que joue cet enseignement à Masséna, le fait que l'initiation à la langue et à la culture arabes, dans la cadre de l'école de la République, constitue un réel besoin pour les élèves d'origine maghrébine, et qu'il soit, pour les élèves non arabophones, une ouverture vers la Méditerranée et les pays du Sud, sont des arguments apparemment non recevables, pas plus d'ailleurs que la preuve par les succès continus obtenus tant dans le secondaire qu'en classes préparatoires.

Le recteur vient de proposer de rouvrir en 2000/2001 avec une formule qui ... n'existe plus dans le schéma des enseignements secondaires pour la prochaine rentrée. Aucune justification, ni pédagogique, ni gestionnaire: c'est donc ailleurs qu'il va falloir se résoudre à rechercher les motifs réels de la décision d'expulser l'Arabe du plus prestigieux lycée de Nice.

L.M.

 

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