Agriculture biologique dans les Alpes-Maritimes – Etat des lieux
Resumé du café démocratie de l’ AdN du 6 juin 2006
Une vingtaine de présents réunis pour le débat, d’horizons
divers : éducation, fonction publique, associatif, et deux agriculteurs…
Invité :
_________
L’association
Agribio 06
L’agriculture bio a vu ses prémisses il y a 30 ans dans les
AM, avec 3 foyers qui s’y sont exercés pour des raisons différentes : les
Federzoni a Grasse, les Grilli dans la plaine du Var,
et les Nys à Golfe Juan.
Le CIVAM a été constitué en 1983, regroupant les
agriculteurs bio, afin d’échanger sur cette démarche encore innovante et
incertaine. Le groupe a tout d’abord cherché à répondre à des questions
techniques et structurelles. Il a connu des années fastes, notamment grâce à
l’emploi jeune, qui a permis d’employer 2 salariés pour répondre aux attentes
des agriculteurs, et d’autres plus difficiles. Aujourd’hui le CIVAM, rebaptisé
Agribio 06, compte environ 50 adhérents, une salarié, qui s’occupe des deux
volets :
-
communication : auprès des producteurs
(information individuelle, bulletin bimestriel, veille réglementaire) et du
grand public (outils de communication, animation des marchés bio, fermes
ouvertes, salons et foires, restauration collective bio)
-
développement : formations sur les
différentes filières, structuration
et finalement de beaucoup
d’administratif, ce qui ne répond que partiellement aux objectifs de l’association.
Voir www.civampaca.org
Cependant les agriculteurs ne sont pas trop inquiets grâce à
l’évolution de la consommation bio (1
Français sur 2 a consommé au moins un produit bio en 2005, voir baromètre).
L’agriculture bio
Définition : c’est la recherche des équilibres naturels
dans le mode de culture ou d’élevage.
L’agriculture bio s’est définie un
cadre rigide de la volonté même des agriculteurs. La définition de
l’agriculture bio c’est faite dans un cadre associatif au départ (associations
de producteurs et consommateurs).
Le positionnement sur « la bio » s’est fait par
rapport à une éthique. Au moment du démarrage de l’agriculture productiviste
(années 50), la question s’est posée de Quel
chemin prendre pour l’agriculture en général ?,
à laquelle certains ont vu une agriculture à la croisée de plusieurs
chemins : environnement, santé, aménagement, sans oublier le social et
l’économique, qui sont devenus la bio. Bien sûr la bio comprend aussi des
opportunistes qui y voient un marché.
En 1992, un cahier
des charges et un logo (« AB ») s’y référant sont reconnus par le
Ministère de l’Agriculture. C’est positif pour la lisibilité et la crédibilité,
mais les professionnels perdent un peu
la maîtrise de leur réglementation, qui devient un outil politique.
Aujourd’hui, une remise à plat du cahier des charges européen est en cours. Les
négociations n’ont pas beaucoup pris en compte les attentes de la société
civile et des professionnels (conditions pas assez contraignantes par exemple).
Mais, avec beaucoup d’énergie dépensée, il est encore possible d’espérer
obtenir un cahier des charges à la hauteur de ce qu’attendent producteurs et
consommateurs.
Le cahier des charges et les contrôles annuels et inopinés
par un organisme indépendant (parmi lesquels Ecocert est le plus connu) portent sur la production, mais aussi la transformation ou
la distribution. C’est l’agriculteur (ou le transformateur, le distributeur)
qui paie son contrôle. En matière de traçabilité, la filière bio
est la plus performante.
Le cahier des charges est un outil technique (ce qu’on peut
faire et ne pas faire) déclinant les modalités d’une charte éthique
(www.agriculturebio.org/upload/attachement26.pdf). Celle-ci montre que le sol est d’importance majeure pour la
culture bio. Filtre pour l’eau, réserve en éléments pour la plante… l’objectif
de la bio est d’entretenir un sol de qualité pour pouvoir produire pour la
planète (voir site état de la planète). Quand les scientifiques cherchent des
OGM pour nourrir la planète, ils encouragent des pratiques qui continuent à
détruire les sols. Or, le sol est un élément non renouvelable, il peut être
détruit en 3 générations de mauvaises pratiques agricoles, mais il faut 1000
ans pour retrouver un sol fertile. La fertilisation repose sur des apports de
matière organique, il s’agit plus d’amendements que d’engrais pour le sol. Le
respect du sol passe également par le désherbage mécanique, la rotation des
cultures, les associations culturales…
Aujourd’hui la France est au 19e rang européen en
terme de pénétration de la bio, et au 1er rang pour la consommation
de pesticides. L’offre est donc assouvie par la demande des pays extérieurs.
L’agriculture bio, coûteuse en main
d’œuvre, s’est exportée là où elle est bon marché : Maroc, Pays de l’Est.
Confiance
La fraude est présente de partout. Malgré les contrôles
rigoureux, la bio n’est pas exception. Les plus gros risque de fraude se
retrouvent là où il y a le plus de volume (et donc d’argent), comme l’affaire
qui avait eu lieu sur les céréales. Maintenant il y a un outil de contrôle de
toutes les transactions qui limite toujours plus les failles. La FNAB suit les
procès mais ils durent longtemps et il y a peu de conclusions encore.
La bio plus cher ?
La question est immanquablement posée, mais l’enjeu financier est-il fondamental face
aux enjeux de santé, d’environnement, d’entretien des paysages… ?
Si l’agriculture bio a encore du
travail en terme de commercialisation et d’accessibilité, le consommateur doit
aussi apprendre à acheter autrement. Nous
sommes le seul pays d’Europe où 95% des produits consommés passent par les
supermarchés. Aussi, le caddy type contient beaucoup d’aliments élaborés
assez superficiels, dont on peut se passer si on fait le choix d’acheter des
produits bios. On ne se rend même plus compte qu’on a le choix et qu’on a pris
l’habitude, on se l’est imposé. Le consommateur doit se libérer de ce phénomène
culturel et la bio est un outil pour en prendre conscience.
Face à la demande en hausse en consommation bio, les marchés de proximité, comme les AMAP (association pour le maintien de
l’agriculture paysanne) sont des alternatives. Les AMAP sont en plein
développement, elles doivent encore travailler sur deux problèmes pour
s’améliorer : qu’elles soient toutes en bio et arriver à proposer un
panier intéressant (autre que chou-blette) en hiver.
Un autre écueil est rencontré en Italie où l’AMAP ressemble à un supermarché,
la relation consommateur – producteur n’existe plus. Ou encore qu’une grande exploitation
vende en gros et passe ses surplus en AMAP.
Dans le 06, les AMAP peuvent permettre au consommateur
d’acheter un panier de légumes à différents points de vente en ville. Ex.
boutique Mondo à Nice.
amap-mondo.affinitiz.com
http://perso.orange.fr/allianceprovence/conso-prod06.htm
Comparaison au
dispositif agriculture raisonnée
En « raisonnée », la traçabilité (suivi allant de
la semence au consommateur) semble être plus légère et le respect des règles floues plutôt dépendre de la
bonne volonté de l’agriculteur. La définition de l’agriculture raisonnée
est : correspond à des démarches
globales de gestion d'exploitation qui visent, au-delà du respect de la
réglementation, à renforcer les impacts positifs des pratiques agricoles sur
l'environnement et à en réduire les effets négatifs, sans remettre en cause la
rentabilité économique des exploitations. Cela concerne par exemple le bien
être animal, la consommation rationnelle d’eau par irrigation l’utilisation des
pesticides dans leur limite d’homologation…... repris dans un cahier de suivi qui font perdre
beaucoup de temps à l’agriculteur sans pour autant garantir la qualité du
résultat.
Les fermes sont « qualifiées » et contrôlées par
rapport à un « référentiel
national ».
La grande distribution pousse vers la qualification
agriculture raisonnée pour valoriser ses produits (ex de la marque Terre et
Saveurs de Casino), tout en imposant à l’agriculteur de financer lui-même son
propre contrôle qualité.
ð L’agriculture raisonné
préconise toujours l’utilisation d’intrants chimiques en se référant à des
données de chimie agronomique. La bio a une vision organique de l’agriculture
et de l’élevage.
Agriculture,
production de masse, et spéculation financière (OGM…)
Le Brésil et la Chine ont misé sur l’exportation pour sortir
de la pauvreté. Il ne s’agit plus là d’agriculture mais de spéculation financière.
L’objectif est de produire en masse par des techniques de modification
génétique des plantes (ex. maïs hybrides), pour les rendre plus résistantes,
plus grandes. Les propriétaires de latifundias en
Argentine sont financés par les fonds de pensions américains et font appelle à
diverses entreprises spécialisées pour gérer leurs cultures : labour,
semis, traitements, récolte.
Exemple : en Espagne, le sol n’est pas toujours d’assez
bonne qualité pour de l’agriculture bio. La plaine d’Almeria a été brûlée par
le sel et les produits chimiques. La cohabitation avec l’agriculture bio n’est plus possible. Les sols sont ruinés.
Les OGM
(organismes génétiquement modifiés) et l’utilisation massive des pesticides
s’inscrivent dans ce schéma. Les investisseurs y voient une sécurisation de
leur placement dans ces domaines. La technique du brûlis réalisée à l’échelle
du gigantisme entraîne une grande fragilisation des sols, lessivés par les
pluies tropicales Une fois le sol « lessivé », il est laissé à
l’abandon.. Cette technique, utilisée depuis toujours,
n’était pas si préjudiciable car les parcelles défrichées étaient entourées par
la forêt qui reprenait le dessus dès son abandon.
Au niveau de la France, en se positionnant comme 1er
exportateur européen, on cherche à avoir un pouvoir de levier : la France
est capable de se faire écouter dans les négociations sur la PAC, etc. Elle
peut préserver ses intérêts politiques et financiers, par exemple la vente de
semences contre l’achat d’uranium. Les ministères qui décident des
réglementations ont un impact considérable sur l’évolution de l’agriculture en
France. Ainsi un « poulet OGM anglais » peut être produit en 75
jours, contre 90 jours pour un poulet bio français.
Liens ville –
campagne
Notre département est un atout pour l’agriculture, entre sa
forte population littorale, son climat diversifié. Mais le surcoût du foncier, où l’on est en périurbain même en montagne,
rend les charges de production trop lourdes. Les bios comme les conventionnels
s’en sortent en moyenne avec un salaire
pour 2 personnes travaillant à temps plein, mais n’ont pas les moyens
d’investir pour améliorer leur outil de production. L’agriculture des Alpes-Maritimes est en danger, même si quelques
agriculteurs continuent à relever le défi au quotidien.
L’organe national de négociation du cahier des charges est
la CNLC, elle réunit producteurs, entreprises, consommateurs. Les producteurs ont donc besoin de l’appui
des consommateurs pour se faire entendre. Aussi, la communication est
importante afin que les citoyens se rendent comptent du contexte de
l’agriculture. Aujourd’hui depuis 3-4 ans, les bios prennent conscience de
l’importance de communiquer hors de leur propre sphère. C’est un virage :
jusqu’alors et pendant 40 ans, le développement de la bio s’est fait de manière
auto-centrée : la bio s’est définie, a élaboré
un raisonnement cohérent, elle a construit son image.
Maintenant, pour continuer à se construire, les partenariats
se tissent entre associations, comme les associations de consommateurs, les
associations d’éducation à l’environnement, de défense de l’environnement (voir
le collectif objectif bio 2007)…
Les personnes présentes pensent qu’il faut plus insister sur
les problématiques de santé, comme argument envers les consommateurs potentiels.
En effet, les pesticides, qu’on ne trouve pas dans les aliments bio, bien
qu’homologués, peuvent être impliqués dans les troubles de la fertilité, les
troubles neurologiques, les cancers… Des affiches seront réalisées, avec des
chiffres-clés comparatifs d’impact sur la santé entre une consommation
« supermarché standard » et une consommation bio.
Boues d’épuration (produits détartrants, métaux lourds), tri
compostage, usine de traitement du compost au Broc. De moins en moins de métaux
lourds et de produits chimiques… Autant d’autres sujets à aborder à notre
prochaine rencontre / oct-nov 2006.
Des ouvrages :
Aux éditions librio, 2G
-
Toxiques alimentaires, Marie Langre
et Maurice Rabach
-
Sites pollués en
France – Enquête sur un scandale sanitaire, Frédéric
Ogé et Pierre Simeon
Des revues :
Les quatre saisons du jardinage
La revue de Nature et Progrès
Biofil
L’age de faire
Des liens :
Organismes
www.civampaca.org (liste des producteurs et de leurs marchés, notamment)
www.bio-provence.org (liste des AMAP)
http://perso.orange.fr/allianceprovence/index.html
Biodiversité
Santé
http://www.pesticides-non-merci.com/pdf/CP060106_Residus_nouveauxChiffres.pdf
http://www.edcas.org/conference_joyeux.htm
www.afssa.fr/ftp/afssa/basedoc/rapportagribio290703.pdf
Faim dans le monde
www.delaplanete.org/IMG/pdf/bio.pdf
la liste des agriculteurs bio des
Alpes-Maritimes avec leurs points de vente disponibles sur demande à Agribio 06.